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« Dans la forêt des signes » a été publié en novembre 2019 aux éditions Parole et Silence.
Ce livre est né de la rencontre des poèmes du frère Gilles Baudry, moine bénédictin de Landévennec, et de mes sculptures.
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L’écriture des mots à travers le poème et l’écriture des formes à travers la sculpture expriment toutes deux le chant de la terre, la beauté du monde invitant à la louange « sur le sentier des simples », la « part d’enfance », la « gratitude ailée », les « versets du vent », mais aussi la « patience des racines » lorsqu’il s’agit de « désherber l’absence ».
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La préface en a été écrite par Marguerite Léna :
L’infime, l’immense
Quoi de plus banal qu’un morceau de bois, brindille ou souche, écorce ou rameau ? qu’un caillou poli et posé par l’océan sur la plage ? Quoi de plus banal que les mots qui répètent l’ordinaire des jours et des choses, que les gestes quotidiens qui égrènent le temps de nos vies ? Poète est celui qui de ces mots usés fait jaillir une parole aussi neuve que le premier matin du monde. Artiste est celui qui de ces choses fugaces et insignifiantes fait saillir une figure insolite et durable. Et quand s’accorde la voix de l’un au geste de l‘autre, nous entrons avec eux dans « la forêt des signes ».
Il faut cheminer dans cette forêt sans y chercher de grandes allées linéaires qui la traverseraient sans nous laisser le temps d’en écouter le silence ou le chant des oiseaux. Gilles Baudry et Roland Machet nous proposent plutôt de prendre tour à tour, à notre gré, des sentiers qui dessinent sans l’imposer un itinéraire spirituel : d’abord regarder assez profondément le réel pour y déceler à la fois « les plaies d’un monde encore à naître » et « les empreintes digitales de Dieu » ; puis, dans ce monde ainsi habité par une présence et une promesse cachées, prendre les verbes de la langue et en faire autant d’étincelantes semences du Verbe : veiller, cheminer, dire, retrouver l’enfance engloutie et sa « gratitude ailée », libérer la louange ou durer dans la nudité du silence… Bref, comme conclut le poème final, se tenir en « funambules entre vertige et extase ».
Tout au long de ce chemin, les sculptures de Roland Machet orchestrent les poèmes de Gilles Baudry. En effet, il ne s’agit pas là d’illustrations, mais plutôt du déchiffrement visuel d’une partition verbale. Le poète parle de fidélité et de vigilance, d’écoute et de patience, de « voix sans âge » et de « langue exaucée ». Le sculpteur recueille d’humbles choses et se rend fidèle à la courbure naturelle d’une écorce de bois, vigilant à la lente collaboration de la sève et du vent pour dessiner les formes d’un branchage ; y ajoutant humblement son propre geste, il en fait surgir la signification enfouie. Tandis que l’un avance mot à mot, l’autre va pas à pas pour ramasser sur sa route un brin de bois ou un peu de glaise, les façonner en visage ou en danse, et évoquer par elles les « versets du vent » ou la « corolle » d’une oreille. Quant au lecteur, il va de l’un à l’autre, à l’un par l’autre, écoutant et regardant à la fois, et exauçant ainsi sans le savoir le projet claudélien d’un « œil qui écoute ».
Gilles Baudry est moine, Roland Machet est père de famille. Tous deux ont pris au sérieux la secrète alliance de l’infime et de l’immense. Il s’agit en effet dans ce livre de très petites choses, sans doute pour signifier notre vie d’hommes, cette « haleine brève, l’existence / si peu / pour ainsi dire rien » et pour rester au plus près du « grain de nos menus gestes ». Mais ces petites choses sont en réalité immenses, car par elles, en elles, « nous allons à la splendeur / de ta rencontre » : Dieu s’approche à travers le murmure des choses, et lorsque l’orant à son tour murmure le Nom au-delà de tout nom, il éveille « quelque part / une source cachée » car « c’est dans l’obscur / que Dieu descend et nous libère. » Inversement, cette immense réalité humano-divine qu’est la vie mystique, la voici mise à portée de regard et comme à portée d’âme. Le lecteur attentif découvre alors qu’elle sourd de la vie la plus familière, et que pour qui sait retrouver le regard d’enfance, un nœud de bois peut devenir « un froissement d’ailes ». Car, comme l’écrivait un autre poète, Jules Supervielle,
« Avec son air très naturel
Le surnaturel nous entoure. »
Critique La Croix Hebdo 17-18 janvier 2020